Ph site opéra de Bordeaux
Quel bonheur ! Des voix ! Et quelles voix ! Je parle des voix femmes ! Voilà enfin des soirées d’opéra que l’on aime et que l’on aimerait avoir un peu plus souvent. Pouvons-nous mieux rêver qu’Heidi Melton dans le rôle d’Ariane ? Cette soprano que Bordeaux connaît bien après son Amélia du Bal masqué et son Elisabeth de Tannhäuser. Je me souviens lui avoir dit un soir après une représentation du Bal masqué : “A quand Ariane ?” C’est fait. Je ne me suis pas trompé et l’Opéra de Bordeaux a eu raison en l’engageant. On pourrait faire le même éloge pour la Zerbinette de Brenda Rae. On reste cloué par la facilité, l'agilité et surtout l'aplomb de sa ligne de chant dans un rôle truffé de difficultés. Que dire du Compositeur, magnifiquement tenu et chanté par Elza van den Heever ? J’avoue préférer dans ce rôle, la tessiture d’une mezzo soprano plutôt que celle d’une soprano lyrique. Cela dit notre Compositeur est d’une vaillance de jeu et de voix remarquable. Je ne veux pas oublier les trois autres rôles féminins, Naïade, L’Echo et Dryade tenus par Mélody Louledjian, Eve Christophe et Katharina Magiera, qui ont enchanté l’auditoire. Du très beau chant en dégustation.
Et les hommes?- Que les hommes me pardonnent, mais j’ai eu quelques difficultés à adhérer à leurs voix. Ingratitude des rôles masculins, écrasement des voix de femmes ? Je ne sais, en tout cas ils ne me laissent pas beaucoup de souvenirs, y compris Bacchus qui a chanté aux forceps, égratignant au passage quelques beaux moments musicaux straussiens.Dans la fosse, la grâce. Notre Orchestre national et son chef Kwamé Ryan, avec le faible effectif souhaité par Richard Strauss, nous ont transporté et offert cette beauté suave des opéras “roses” de l’auteur.
Ombres de mise en scène- Reste la mise en scène de Roy Rallo. L’acte-prologue démarre merveilleusement bien. Le choix d’une galerie d’art contemporain au lieu d’un salon bourgeois viennois fonctionne très bien et même très bien. Fonds de murs délabrés, lavabos (enfin les revoilà sur scène, ils me manquaient…), décors salis volontairement, et présence unique d’un immense oeuvre contemporaine. Tout cela se tient, et les chanteurs ont l’air de s’y sentir bien. Puis, brutalement, à l’acte principal tout tombe dans la laideur. Laideur du décor et surtout de l’éclairage. Quel manque de respect pour le public. Ce n’est pas sombre, c’est très mal éclairé. Les visages dans l’ombre. On pense plus à une panne électrique ou a un service minimum des électriciens jour de grève, qu’à une subtilité de mise en scène. J’ai là en mémoire des spectacles très sombres presque dans le noir mais que c’était beau, on arrivait à voir (grâce à de talentueux metteurs en scène et éclairagistes) les visages et le jeu de physionomie des chanteurs. Ici rien. Lorsque l’on vient voir un spectacle vivant c’est pour voir les protagonistes et surtout les solistes qui chantent. De plus, soit je n’ai rien compris dans l’histoire, mais il semble que l’intrigue dit que pour gagner du temps et pour ne pas ennuyer les invités, les deux troupes séria et bouffe joueraient en même temps. On parle même de comédiens de la commedia del arte. Où étaient-ils donc ? Nous avions sur scène deux prestations identiques. À aucun moment, on ne distinguait au premier coup d’oeil le seria du bouffe. Bien sûr l’intention du metteur en scène est plus sensée, plus intellectuelle, plus recherchée. En clair, il a voulu dire quoi ? Que l’amour, que l’on soit sérieux, triste ou joyeux est le même, que ce n’est pas parce qu’on plaisante toute la journée que l’on est heureux en amour, etc etc… OK, on a compris ! Et le respect de l’histoire et le respect du public (voire des chanteurs) où est-il ? Je rappelle que cet unique acte est musicalement d’une beauté extrême, alors pourquoi vouloir nous gâcher ce plaisir à l’oreille par la laideur de la vue?
En toute objectivité, si je ne dois garder qu’une seule image de la mise en scène de cette production, c’est l’ouverture sur la fin du duo d’amour qui clôture l’ouvrage, des portes de l’arrière-scène du Grand Théâtre qui laissent entrevoir la rue arrière. C’est la première fois que je vois l’utilisation de ces portes. Que c’est fort et beau !
Jean-Claude Meymerit
Et les hommes?- Que les hommes me pardonnent, mais j’ai eu quelques difficultés à adhérer à leurs voix. Ingratitude des rôles masculins, écrasement des voix de femmes ? Je ne sais, en tout cas ils ne me laissent pas beaucoup de souvenirs, y compris Bacchus qui a chanté aux forceps, égratignant au passage quelques beaux moments musicaux straussiens.Dans la fosse, la grâce. Notre Orchestre national et son chef Kwamé Ryan, avec le faible effectif souhaité par Richard Strauss, nous ont transporté et offert cette beauté suave des opéras “roses” de l’auteur.
Ombres de mise en scène- Reste la mise en scène de Roy Rallo. L’acte-prologue démarre merveilleusement bien. Le choix d’une galerie d’art contemporain au lieu d’un salon bourgeois viennois fonctionne très bien et même très bien. Fonds de murs délabrés, lavabos (enfin les revoilà sur scène, ils me manquaient…), décors salis volontairement, et présence unique d’un immense oeuvre contemporaine. Tout cela se tient, et les chanteurs ont l’air de s’y sentir bien. Puis, brutalement, à l’acte principal tout tombe dans la laideur. Laideur du décor et surtout de l’éclairage. Quel manque de respect pour le public. Ce n’est pas sombre, c’est très mal éclairé. Les visages dans l’ombre. On pense plus à une panne électrique ou a un service minimum des électriciens jour de grève, qu’à une subtilité de mise en scène. J’ai là en mémoire des spectacles très sombres presque dans le noir mais que c’était beau, on arrivait à voir (grâce à de talentueux metteurs en scène et éclairagistes) les visages et le jeu de physionomie des chanteurs. Ici rien. Lorsque l’on vient voir un spectacle vivant c’est pour voir les protagonistes et surtout les solistes qui chantent. De plus, soit je n’ai rien compris dans l’histoire, mais il semble que l’intrigue dit que pour gagner du temps et pour ne pas ennuyer les invités, les deux troupes séria et bouffe joueraient en même temps. On parle même de comédiens de la commedia del arte. Où étaient-ils donc ? Nous avions sur scène deux prestations identiques. À aucun moment, on ne distinguait au premier coup d’oeil le seria du bouffe. Bien sûr l’intention du metteur en scène est plus sensée, plus intellectuelle, plus recherchée. En clair, il a voulu dire quoi ? Que l’amour, que l’on soit sérieux, triste ou joyeux est le même, que ce n’est pas parce qu’on plaisante toute la journée que l’on est heureux en amour, etc etc… OK, on a compris ! Et le respect de l’histoire et le respect du public (voire des chanteurs) où est-il ? Je rappelle que cet unique acte est musicalement d’une beauté extrême, alors pourquoi vouloir nous gâcher ce plaisir à l’oreille par la laideur de la vue?
En toute objectivité, si je ne dois garder qu’une seule image de la mise en scène de cette production, c’est l’ouverture sur la fin du duo d’amour qui clôture l’ouvrage, des portes de l’arrière-scène du Grand Théâtre qui laissent entrevoir la rue arrière. C’est la première fois que je vois l’utilisation de ces portes. Que c’est fort et beau !
Jean-Claude Meymerit